Câest LA question que tout le monde pose Ă une femme enceinte, quâelle fasse partie de lâentourage proche ou non. Tout le monde pose cette question, en partant sĂ»rement du principe que tout le monde veut savoir le sexe dâun bĂ©bĂ© Ă naĂźtre, et surtout que les parents ont envie de le dire Ă nâimporte qui, comme si ils voulaient forcĂ©ment le crier Ă la terre entiĂšre. DerriĂšre cette question en apparence anodine, il y a quand mĂȘme plusieurs trucs qui peuvent dĂ©ranger. Quâest ce que ça peut faire de le savoir, surtout quand on est pas le futur parent? Quels clichĂ©s cela peut vĂ©hiculer? En quoi savoir si câest une fille ou un garçon influera sur comment tu aborderas ce futur bĂ©bĂ©? Est-ce que cette question est rĂ©ellement indiscrĂšte ou acceptable?
Je ne veux ni divulguer ni connaßtre le sexe de mon bébé.
De base, je ne voulais pas du tout connaßtre le sexe de mon bébé pour plusieurs raisons :
Par rapport à ma santé.
Parce que tomber enceinte et avoir des enfants est difficile pour moi compte tenu de ma santĂ©. Je prĂ©fĂšre donc attendre un enfant, qui sera peut-ĂȘtre enfant unique, plutĂŽt qu’attendre une fille ou un garçon. Quand on a une fertilitĂ© quasi nulle, on ne fait pas la fine bouche. Et quand on a 2 chances sur 3 de faire une fausse couche quand on a enfin un test de grossesse positif, tomber enceinte nâa rien dâune nouvelle heureuse durant tout le premier trimestre.
De plus, si tu as lu lâarticle dans lequel je parlais de mon premier trimestre, je nâai pour le moment aucune envie de revivre ça une nouvelle fois. Inutile de me dire que une fois que bĂ©bĂ© sera lĂ tu auras oubliĂ©. Non, parce que jâai Ă©tĂ© profondĂ©ment choquĂ©e psychologiquement, parce que jâai Ă©tĂ© en Ă©tat dâanxiĂ©tĂ© extrĂȘme de peur de faire une fausse couche, que jâai voulu mettre fin Ă mes jours, et que ça a considĂ©rablement augmentĂ© mes douleurs. Donc non. Une pĂ©riode aussi sombre ne sâoublie pas.
Par conviction.
Principes et valeurs
Parce je suis profondĂ©ment fĂ©ministe, et donc je me considĂšre comme anti-sexiste. Je ne suis pas parfaite, et encore moins totalement dĂ©construite sur le sujet. Voulant de ce fait proposer une Ă©ducation non sexiste Ă mon/mes enfant(s), je veux pouvoir Ă©duquer une fille comme j’Ă©duquerais un garçon, et vice versa. L’appareil gĂ©nital d’un individu n’a pas Ă dĂ©terminer une façon dâĂ©duquer. De plus, par rapport Ă mes proches par exemple, je ne souhaite pas que l’identitĂ© de mon bĂ©bĂ© ne soit dĂ©terminĂ©e que par son sexe.
Parce que vouloir Ă tout prix savoir le sexe de mon bĂ©bĂ© tout en sachant que je suis anti sexiste, c’est mettre MES exigences en terme d’Ă©ducation de MON enfant au second plan. C’est cautionner le fait qu’une paire de chromosomes ou un appareil gĂ©nital dĂ©termine une future personne, et donc aller dans l’idĂ©e que les sexes ne sont pas Ă©gaux.
Par goût personnel
Parce que je dĂ©teste profondĂ©ment les vĂȘtements et autres accessoires genrĂ©s. Un vĂȘtement, le mobilier, un jouet n’a pas de genre. Si l’utilisation d’un objet doit ĂȘtre dĂ©terminĂ© par l’appareil gĂ©nital d’un individu, c’est que cet objet n’est pas pour les enfants. De base, je ne suis pas particuliĂšrement “fĂ©minine”. J’ai toujours prĂ©fĂ©rĂ© m’habiller avec des vĂȘtements qui me plaisent plutĂŽt qu’avec des vĂȘtements reprĂ©sentant mon genre. Donc le clichĂ© rose pour les filles et bleu pour les garçons, je l’ai en horreur. Le sexe et le genre sont deux choses diffĂ©rentes. Le souci, c’est que la grande majoritĂ© de mes proches ne sont pas de cet avis. Je ne compte plus les fois ou je me suis prise des remarques parce que “on ne sait pas quoi acheter comme vĂȘtements“. Un bĂ©bĂ© est un bĂ©bĂ© ! Je m’attends dĂ©jĂ Ă recevoir des cadeaux ultra genrĂ©s alors que dĂšs le dĂ©but, j’ai prĂ©cisĂ© Ă tout le monde que je refuse les cadeaux genrĂ©s. Oups. Aujourd’hui, j’ai reçu des bavoirs ultra genrĂ©s. Merci Ă ma gĂ©nitrice de faire toujours de ton mieux pour ne pas respecter mes souhaits et agir de façon aussi Ă©goĂŻste. Jâai aussi appris que ma belle mĂšre nous envoie un colis de vĂȘtements quâelle a tricotĂ©s⊠et jâimagine dâavance les couleurs clichĂ©s quâauront ces vĂȘtements. Mais je ne dirai rien si on tombe dans ce que je nâaime pas, parce que je ne me souviens pas lui avoir communiquĂ© mes goĂ»ts. Je pars du principe qu’elle ne savait pas, cela peut arriver.
Donc oui, pour certaines personnes, connaĂźtre le sexe d’un bĂ©bĂ© permet de se projeter⊠quand on imagine un enfant de façon binaire H/F avant mĂȘme de le considĂ©rer comme un humain Ă part entiĂšre.
Comme tu l’auras devinĂ©, mes principes sont passĂ©s au second plan pour un entourage ayant une vision binaire et obsolĂšte de ce qu’est un enfant. On m’a eu Ă l’usure. Et je le regrette. Je suis dĂ©goutĂ©e. Je ne me sens pas respectĂ©e.
Câest pour une fille ou un garçon ? âą Vive le marketing.
Les vĂȘtements genrĂ©s ne sont que du marketing. Jusque dans les annĂ©es 40, tous les bĂ©bĂ©s portaient du blanc et des robes, filles comme garçons. Les vĂȘtements faisaient le tour de la famille. Jusqu’au dĂ©but du XXĂš siĂšcle, le rose et le bleu Ă©taient mal vus sur un enfant parce que cela renvoyait Ă une sexualisation de l’enfant. Le rose Ă©tait mĂȘme perçu comme masculin car dĂ©rivĂ© du rouge symbolisant le masculin, la force, le sang. Le bleu Ă©tait vu comme fĂ©minin parce que doux, et couleur de la robe de la vierge. Sauf que merci le marketing, le genrĂ©, ça fait vendre.
La binaritĂ© rose/bleu pour fille/garçon est arrivĂ©e aprĂšs la seconde guerre mondiale. Il fallait absolument pouvoir diffĂ©rencier un petit garçon d’une petite fille, parce que ce qui est fĂ©minin dĂ©valorise le masculin. Et c’est encore trĂšs prĂ©sent aujourd’hui, rien qu’en considĂ©rant les insultes destinĂ©es aux hommes : femmelette, effĂ©miné⊠Renvoyant encore au fait que les femmes sont infĂ©rieures.
“Forcer” les familles Ă faire deux garde-robes pour deux enfants de sexe diffĂ©rent, c’est vendre deux fois plus. Les marketeux ont fait leur job Ă la perfection, les gens ont intĂ©grĂ© leurs techniques commerciales comme Ă©tant des valeurs Ă adopter au quotidien. Et quand on tente de sâen dĂ©patouiller, on se fait blĂąmer. On est forcĂ©s Ă suivre le mouvement. Et câest intolĂ©rable.
Câest le mĂȘme dĂ©lire pour les jouets, les cartables et fournitures scolaires, les produits de toilette⊠Dans la grande distribution, il ne faudrait surtout pas que les genres soient mĂ©langĂ©s, quâune fille reste une fille et quâun garçon reste un garçon. Ăa mâĂ©puise.
Tu donnes la main, on te mange le bras.
Mon mari voulait savoir le sexe de notre bĂ©bĂ©. Je ne voulais pas. Ma condition ? Ok, on le saura. Mais on ne dit rien Ă personne. Il a une petite prĂ©fĂ©rence personnelle et câest ok. Et lâĂ©chographie a montrĂ© ce quâil espĂ©rait, mĂȘme si lâinverse aurait Ă©tĂ© une bonne nouvelle quand mĂȘme. Il a voulu l’annoncer Ă ses parents tellement il Ă©tait fier, et je le comprends. Encore un compromis⊠En dĂ©saccord avec mes valeurs. Mais ok, tes parents et les miens ne sont pas en contact, et je sais que câest surtout mon cĂŽtĂ© de la famille qui prend toujours trop ses aises. Enfin. Je gĂ©nĂ©ralise, mais le problĂšme, c’est surtout ma mĂšre.
Forcing et fatigue psychologique
Je ne blĂąme pas mon mari. Je blĂąme mon entourage qui m’a littĂ©ralement harcelĂ©e pour savoir tout en sachant que je ne voulais pas. Se sentir pas respectĂ©e Ă ce point et quand c’est insistant et lourd, c’est violent. AprĂšs le harcĂšlement quasi quotidien de la part de ma mĂšre, c’est ma belle mĂšre qui a fait son annonce sur FB⊠à ma place. Je pensais quâelle lâaurait gardĂ© pour elle, et en fait non. J’ai eu beau rĂ©pondu de maniĂšre courtoise que NON, le sexe est une surprise, elle a insistĂ© de plus belle⊠en public. J’imagine qu’elle ne pensait pas Ă mal et qu’elle Ă©tait contente d’annoncer la nouvelle. Une gaffe, une maladresse, d’accord. Mais insister quand je rectifie le tir, j’ai eu du mal. Idem du cĂŽtĂ© de ma famille. Ma grand mĂšre a Ă©tĂ© mise au courant. Et l’info a fait le tour de la totalitĂ© de la famille. Par le biais d’une autre personne que moi. Je ne peux pas dire qui a pas su tenir sa langue, je n’ai aucune preuve. Mais quand on m’envoie un message “GĂ©nial vous attendez unâąe petitâąe garçon/fille!”, je sais que ça vient d’une de ces trois personnes.
Je suis Ă©cĆurĂ©e. Pas Ă cause du sexe de mon bĂ©bĂ©, mais Ă cause de ces proches qui ne respectent pas mes souhaits. Ce manque de respect Ă commencĂ© dĂšs ma 12Ăšme semaine de grossesse, soit Ă partir du moment prĂ©cis oĂč ils ont Ă©tĂ© au courant de la grossesse. Jâangoisse beaucoup pour la suite. Si on n’est pas capables de respecter mes choix sur quelque chose d’aussi personnel, je sais que tout sera un combat. Et je sais d’avance que je n’ai pas l’Ă©nergie pour.
Si il doit y avoir un second enfant, je le verrai dans lâobligation de demander Ă l’Ă©chographiste de cacher le sexe, mĂȘme pour mon mari. A cause d’une famille qui fait passer sa curiositĂ© et ses prĂ©jugĂ©s avant MES souhaits. Inutile de me rabĂącher que je nâavais quâĂ rĂ©sister: ce serait abject. DĂ©jĂ parce que face Ă du harcĂšlement, tu passes en mode survie, et que je nâai pas lâĂ©nergie nĂ©cessaire pour rĂ©sister à ça. Ils le savent. Ils en profitent. Inutile de prĂ©ciser que ça influe fortement sur mon envie de renouveler lâexpĂ©rience. Et c’est dommage.
Maintenant que l’annonce a Ă©tĂ© faite malgrĂ© moi, je me fais harceler pour le prĂ©nom. Ăa ne cessera donc jamais. Je suis Ă©puisĂ©e d’avance de cette parentalitĂ© pour laquelle je ne serai pas respectĂ©e. Comme pour beaucoup de domaines. Encore ce matin, ça a recommencĂ©. Elle mâa harcelĂ©e au tĂ©lĂ©phone pour avoir la premiĂšre lettre du prĂ©nom, elle mâa encore eu Ă lâusure il y a quelques semaines. Sa derniĂšre lubie du jour? Me taguer publiquement sur facebook sur des publications de prĂ©noms commençant par la lettre quâelle a rĂ©ussi Ă avoir, encore par le harcĂšlement et la culpabilisation. Je lâai envoyĂ©e se faire foutre. Mais je sais que jâen subirai les consĂ©quences un jour ou lâautre.
Exemple du manque de respect constant envers mes dĂ©cisions : mon alimentation. Je ne mange pas d’animaux, tout le monde le sait. Et malgrĂ© ça, on a quand mĂȘme osĂ© me demander de âfaire des efforts” pour MON repas lors de MON mariage. Ou encore, en repas de famille : “tu te prives de vitamines“, “t’es chiante Ă rien manger” ou “tu sais, c’est bon ça“. Le respect chez certaines personnes, ça semble ĂȘtre une notion trĂšs abstraite. Je sens venir dâavance les âtu maltraites ton enfantâ si quand iel aura lâĂąge de comprendre que son steak vient dâune vache, ne voudra plus en manger. Comme moi quand jâĂ©tais petite. Parce que clairement, si Ă 5 ans iel refuse de manger de la viande, je ne le/la forcerai pas. Je respecterai ses souhaits. Et si iel veut en manger de nouveau, ça sera pareil: je respecterai ses choix.
Mâimposer?
Je suis assez furax pour la rĂ©daction de cet article. Je sais que tout le monde ne pense pas Ă des conseils non sollicitĂ©s, qu’il y a des personnes qui peuvent comprendre ma situation et qui ne me dĂ©valoriseront pas. Mais je suis tellement mal aujourd’hui, t’as mĂȘme pas idĂ©e. Ou peut-ĂȘtre que si. Du coup, je suis clairement sur la dĂ©fensive et j’anticipe les rĂ©actions dĂ©sagrĂ©ables que je n’ai pas envie de subir.
Je sais ce que tu penses sĂ»rement en lisant cet article. Que je suis une chochotte, que jâaurais du mâimposer, clairement exposer mes principes. Et bien Ă©videmment que je lâai fait. Mais quand il y a dans une famille une dynamique toxique, tu auras beau tout dire, jamais tu ne seras prisâąe au sĂ©rieux. Ăa a toujours Ă©tĂ© comme ça, jamais je ne me suis sentie respectĂ©e dans mes choix, quels quâils soient. Il a toujours fallu que je respecte les choix des autres avant les miens sous peine dâĂȘtre rĂ©primandĂ©e a cause de mon « Ă©goĂŻsme ». Câest assez cocasse de la part de personnes qui mâont harcelĂ©e et ont bafouĂ© tous mes choix au profit des leurs, tu ne trouves pas? Comme me lâa expliquĂ© ma psy, ma mĂšre est dans un travers bourreau/victime. Si elle ne peut pas exercer dâemprise sur toi, elle te dĂ©molira Ă coups de culpabilisation.
Tâas encore envie de donner un conseil non sollicitĂ© par rapport Ă cette situation, du genre « tâas quâĂ couper les ponts avec eux »? Je voudrais bien te voir Ă ma place si câest le cas. Ce nâest pas aussi facile parce que je sais que jâen paierai les consĂ©quences toute ma vie. Donc jâessaye de laisser couler, je pense Ă ma survie et Ă ma santĂ© mentale dâabord, mĂȘme si rien nâest infaillible. Je compose avec les moyens que jâai et je nâai aucun jugement Ă recevoir de qui que ce soit.
Bref.
ArrĂȘtez de voir un enfant comme un ĂȘtre sexuĂ© et genrĂ© avant mĂȘme un ĂȘtre humain.
ArrĂȘtez de bafouer les souhaits et les valeurs des gens pour satisfaire votre Ă©goĂŻsme, votre curiositĂ© malsaine et vos principes dâun autre temps.
Respectez les souhaits des gens.
Vous ĂȘtes violents.
Si tu es enceinte ou que tu as dĂ©jĂ des enfants, ou mĂȘme de maniĂšre gĂ©nĂ©rale sans tout ça, jâespĂšre que ta famille te respecte et respecte tes choix. Et si tu es parent, jâespĂšre que tu respectes le choix de tes enfants. (Attention, je sais quâun enfant ne peut pas forcĂ©ment faire tous ses choix lui mĂȘme et que parfois il faut dĂ©cider pour eux, quâon ne me fasse pas dire ce que je nâai pas dit.) Il nây a rien de pire que des parents qui considĂšrent leurs enfants majeurs comme encore des objets dont ils sont propriĂ©taires ou comme des gamins. Ăa peut faire de gros dĂ©gĂąts.
Tout ça pour dire que je pense ne pas me tromper si je dis, au nom de tous les parents, que les proches qui insistent et qui bafouent les principes des autres font vraiment chier. Respectez les choix des autres avant de penser Ă votre curiositĂ© et votre satisfaction personnelle. Tout le monde nâa pas les mĂȘmes principes. Tout le monde nâa pas envie de rĂ©vĂ©ler le sexe et le prĂ©nom dâun enfant Ă naĂźtre, et il faut respecter ces choix sans insister.
Et toi, comment ça se passe de ton cÎté?
Jâai eu la chance de vivre ma premiĂšre grossesse loin de ma famille et ma belle famille, et jâai clairement dit Ă tous ceux qui faisaient le forcing que la seule chose quâils allaient gagner, câest moins de temps pour le voir. Je leur ai dit que ma santĂ© mentale passait avant leurs intĂ©rĂȘts et que sâils voulaient faire du chantage je pouvais aussi. Et de leur re-prĂ©ciser que je suis rancuniĂšre et nâoublie jamais⊠On mâa fichu la paix. Et ils savent que sâil y en a un second et quâils sont proches, ils nâauront droit Ă rien de plus.
Coucou, merci pour ton commentaire đ
Comment a réagi ta famille? Les rapports sont pas trop tendus du coup?
Tu as bien fait en tout cas. Câest triste mais parfois la distance a du bon.